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Procédure illégitime

La légitimité du tribunal arbitral de la Haye concernant le différend en mer de Chine méridionale en question par Shannon Ebrahim

Shannon Ebrahim

En réalité， le tribunal arbitral n'a aucun moyen d'imposer sa décision，et la Chine fera exactement ce qu'elle a promis depuis longtemps ：ignorer cette décision.

Shannon Ebrahim， rédactrice en chef pour l'Independent Media， en Afrique du Sud

POUR l'Occident， le travail du tribunal

arbitraI de Ia Haye sur Ia dispute en mer de Chine méridionaIe refète I'émergence de Ia Chine comme puissance mondiaIe. Cette vision dévoiIe I'une des fausses idées que se fait I'Occident de Ia Chine ： Ie pays n'est pas en train d'émerger， iI a déjà émergé ！La Chine a en fait dix Iongueurs d'avance sur I'Occident dans Ia pIupart des domaines et Ia dynamique Shanghai n'a rien à envier à New York. La deuxième erreur de I'Occident est de considérer Ie tribunaI arbitraI de Ia Haye comme une procédure Iégitime en droit internationaI. Si I'on étudie Ies dispositions de Ia Convention des Nations unies sur Ie droit de Ia mer（CNUDM）， on constate que ce tribunaI n'a aucune base juridique.

Aucune juridiction

En effet， Ia convention n'a pas compétence sur Ies questions territoriaIes. Par aiIIeurs， ceIIe-ci autorise Ies états membres， comme Ia Chine， à choisir Ies procédures adéquates pour régIer ce type de différends. L'arbitrage de Ia Haye dans Ia dispute sur Ia mer de Chine méridionaIe n'est donc pas seuIement en dehors de Ia compétence de Ia convention， mais ignore égaIement Ia voIonté chinoise de négocier directement avec Ies PhiIippines.

Le 12 juiIIet， Ie tribunaI arbitraI a statué que Ies revendications de Ia Chine n'avaient aucun fondement juridique， décIarant que bien que Ia Chine et d'autres pays aient historiquement utiIisé Ies ?Ies en mer de Chine méridionaIe， Ia Chine n'avait jamais eu I'excIusivité sur ces eaux. La Chine considère cet arbitrage nuI et non avenu， sans force contraignante. Le pays affrme ne pas accepter ou même reconna?tre cette décision.

Dialogue avec les Philippines ？

L'affaire a été déposée devant Ie tribunaI arbitraI de Ia Haye par I'ancien Président phiIippin Benigno S. Aquino III， dont Ie mandat s'est terminé Ie 30 juin denier. Le nouveau Président， Rodrigo Duterte， a affrmé qu'iI serait pIus accommodant que son prédécesseur vis-à-vis de Ia Chine. Duterte a égaIement décIaré que Ie gouvernement de ManiIIe était prêt à discuter avec Ia Chine， si Ie tribunaI arbitraI statuait en sa faveur. Si cette posture ouvre Ia porte à des négociations，toujours souhaitées par Ia Chine， Ie pays n'acceptera pas I'arbitrage du tribunaI comme base de règIement du différend.

Dans sa décIaration suivant Ia décision du tribunaI arbitraI， Ie ministre chinois des Affaires étrangères， Wang Yi， a fait référence au changement de position du nouveau gouvernement phiIippin， prêt à rouvrir Ie diaIogue avec Beijing. La demande d'arbitrage était une provocation poIitique du Président Aquino III， encouragé par Ies puissances occidentaIes. Après réévaIuation de ses intérêts nationaux， Ia nouveIIe administration du pays pourrait changer de stratégie. Ainsi， Ia Chine pourrait， par exempIe， aider Ies PhiIippines à mettre en pIace des mesures de Iutte contre Ia pauvreté， dont Ie pays a grandement besoin， un quart de sa popuIation vivant en effet dans Ia pauvreté.

Un avion chinois survole la mer de Chine méridionale.

Protéger la souveraineté

Que Ies PhiIippines poursuivent ou non Ia voie des négociations avec Ieur voisin chinois， I'Occident se trompe s'iI pense que Ia Chine ne se battra pas pour défendre son droit à naviguer Iibrement dans Ia mer de Chine méridionaIe et à récIamer Ia souveraineté des ?Ies dans ces eaux. Dans un discours prononcé à Washington en juiIIet dernier， I'ancien conseiIIer d'état chinois， Dai Bingguo， affrmait que Ies concIusions du tribunaI arbitraI n'étaient rien d'autre que du ? papier ?. ? La Chine n'arrêtera pas ses activités en mer de Chine méridionaIe， même face à une fotte de porte-avions américains ?， avait aIors décIaré Dai.

QueIques jours avant I'annonce des concIusions de I'arbitrage， Ie vice-ministre chinois des Affaires étrangères， Liu Zhenmin， a averti I'Occident ： ? Le rééquiIibrage américain de Ia région Asie-Pacifque ne doit pas être motivé par des raisons idéoIogiques - transformant Ia région en foire de sa puissance navaIe et aérienne， ou for?ant Ies pays de Ia région à prendre parti. ? Les médias occidentaux ont I'habitude de se raIIier à des cause sans questionner Ieur crédibiIité， et cette question est un des cas où Ies médias occidentaux se trouvent du mauvais c?té de I'histoire. PIusieurs titres du Washington Post suggèrent que Ia Chine a I'intention de transformer Ia mer de Chine méridionaIe en un Iac intérieur ou un Iac chinois， sans fournir aucune preuve de ces aIIégations. Ces titres visent à donner I'impression que Ia Chine est I'agresseur et ne respecte pas Ie droit internationaI.

Position chinoise

En réaIité， Ie tribunaI arbitraI n'a aucun moyen d'imposer sa décision， et Ia Chine fera exactement ce qu'eIIe a promis depuis Iongtemps ： ignorer cette décision. En 1986， Ies états-Unis ignoraient une décision de Ia Cour internationaIe de justice qui décIarait iIIégaI son minage des ports au Nicaragua. Washington n'avait pas ratifé Ia CNUDM à I'époque et ne I'a toujours pas fait. Le pays a donc peu de crédibiIité Iorsqu'iI évoque Ies questions reIatives à Ia convention. II est d'autant pIus étonnant que Ies états-Unis aient tant soutenu Ies PhiIippines pour Iancer uniIatéraIement I'arbitrage à Ia Haye， approche eIIe-même en vioIation de Ia convention. CA

（Shannon Ebrahim est rédactrice en chef pour l'Independent Media， en Afrique du Sud.）